le Nouveau Testament, publié par Saugrain et Didot jeune, 1793-1798.

Vers 1790, Claude Marin Saugrain, fils et successeur de l’éditeur Antoine Saugrain, âgé de 34 ans, met en chantier une nouvelle édition du Nouveau Testament, dans la traduction de Lemaitre de Sacy, qui date du siècle précédent, mais est toujours très lue – et le sera encore longtemps.

Pour cette édition il demande les illustrations à Jean-Michel Moreau « le Jeune » (pour le distinguer de son frère ainé) ; et pour l’impression il s’associe à Pierre-François Didot (également appelé Didot le Jeune – c’est le jeune frère de François-Ambroise Didot).

Les évènements de la Révolution en cours ne perturbent pas, ou peu, cette tâche. Il sollicite, et obtient, en 1791, l’autorisation d’offrir la dédicace à l’Assemblée Nationale. Dans le même temps, on a vu que Didot Jeune, imprimeur de Monsieur, demande le transfert de cette charge à son fils.

Ces trois personnages, Saugrain, Didot Jeune et Moreau le Jeune, se connaissent bien ; ils entretiennent des liens étroits – et même des liens de parenté.

En effet, Claude-Marin Saugrain épouse Louise Chalgrin, fille de l’architecte Jean-François Chalgrin et d’Emilie Vernet, sœur de Carle Vernet. Emilie Vernet est la belle-sœur de Catherine (Fanny) Moreau, fille de Moreau le Jeune, qui a épousé Carle Vernet – Emilie Vernet sera guillotinée en 1794. Au passage, on peut noter que Moreau est le beau-père de Carle Vernet et le grand-père d’Horace Vernet. Dans un registre moins gai, on relève qu’une autre sœur de Claude Marin Saugrain a épousé le médecin Joseph Guillotin, dont la machine qui portera son nom servira a exécuter la mère de sa belle-sœur..

Par ailleurs, Claude-Marin Saugrain est le beau-frère de Henri Didot, fils de Didot le jeune qui épouse sa sœur Angélique. En élargissant un peu la recherche, on trouverait également les familles de Bure et Prault..

Jean-Michel Moreau réalise au moins 112 dessins, qu’il signe et date – de 1790 à 1797. La publication commence début 1791, par livraisons successives, hebdomadaires, comportant 16 pages, au prix de 40 sols (42 sols franco de port) sur vélin et 30 sols pour le papier ordinaire. Le premier évangile (Mathieu) est complété en 21 livraisons, en juillet 1791 paraît la 26e livraison, et en mai 1792 la 43e livraison. La fin de la première partie, en quatre tomes comprenant les quatre évangiles, est annoncée pour septembre 1792. Cette partie paraît donc avec la date de 1793. Une cinquième partie, avec les Actes de Apôtres, ne paraîtra que bien plus tard, sous la date de 1798 ; de ce fait cette partie manque fréquemment. La publication s’arrête avec ce cinquième tome.

L’édition est entièrement illustrée de gravures d’après les dessins de Moreau le jeune, répartis comme suit :

– tome 1, évangile de Saint-Mathieu : un frontispice et 28 gravures ;
– tome 2, évangile de Saint-Marc : un frontispice et 11 gravures ;
– tome 3, évangile de Saint-Luc : un frontispice et 24 gravures ;
– tome 4, évangile de Saint-Jean : un frontispice et 17 gravures ;
– tome 5, actes des apôtres : 28 gravures.

112 dessins pour le Nouveau Testament : Moreau a essayé de ne pas représenter plusieurs fois les mêmes scènes, et a réparti les images les plus frappantes sur les quatre évangiles. Mais il n’a pu empêcher que de nombreuses scènes soient assez semblables, et finalement peu intéressantes : nous voyons ainsi souvent un homme s’exprimer avec plus ou moins d’emphase devant une foule ébahie… gravées par des graveurs nombreux (et pas par Moreau), ces illustrations ne sont en général pas bien considérées – ainsi Schefer n’en reproduit-il aucune dans son livre. Mais si on met à part ces scènes peu inspirées, ses gravures méritent d’être mieux considérées.

En voici une petite sélection :

le livre est un in-quarto de taille in-8° pour le tirage courant : de 13,5 à 15 cm, sur 20 à 22 cm (suivant l’ardeur du relieur) – il existe des exemplaires tirés sur un format in-4°, de 22 cm sur 30 cm environ. Les tomes ont des paginations variées :

– tome 1 : (1), faux-titre, titre, éventuellement vii (épitre dédicatoire), 327 pages.
– tome 2 : (1), faux-titre, titre, 207 pages.
– tome 3 : (1), faux-titre, titre, 345 pages.
– tome 4 : (1), faux-titre, titre, 263 pages, se terminant par l’avis au relieur pour le placement des gravures.
– tome 5 : (1), faux-titre, titre, 349 pages.

Les gravures ne sont pas incluses dans la pagination. Le texte latin est présent sur les pages paires, et la traduction sur les pages impaires, en regard.

Nous avons vu que la publication en livraisons comprenait deux papiers différents – mais des tirages sur d’autres papiers ont été réalisés. Brunet recense ainsi cinq papiers différents :

– papier ordinaire,
– grand papier,
– grand papier vélin,
– in-4° avec figures avant la lettre,
– in-4° grand papier vélin, figures avant la lettre et épitre à l’assemblée nationale, « dont, à ce qu’on assure, il n’y a que 18 exemplaires »

Dans cette liste il faut comprendre que les trois premiers tirages ont des dimensions d’in-8°.

Une annonce publiée dans le Journal typographique et bibliographique du 25 brumaire an 10 (16 novembre 1801) nous présente le cinquième tome et nous donne des informations importantes sur le tirage :

Le cit. Poncelin, imprimeur-libraire, à Paris, rue de Hurepoix, quai des Augustins, n° 17, prévient les libraires, ses confrères, que le 15 frimaire [6 décembre 1801], jour fixe, il mettre en vente les ACTES DES APOTRES, faisant suite aux EVANGILES, publiés précédemment par le citoyen Saugrain ; ouvrage enrichi de 28 gravures, exécutées par les meilleurs artistes de Paris, d’après les dessins du cit Moreau jeune. Un vol. in-4° pap. nom de Jésus vélin, gravures avant la lettre, 100 fr., relié à la Bradel (Il n’en a été tiré que 12 exempl.).
Le même, pap vél. d’Essone, aussi épreuve avant la lettre, 60 fr. (il n’en a été tiré que 50 exemplaires).
Le même, pap. vél., épr. après la lettre, 50 fr. (tiré aussi à 50 exemplaires)
Le même, format in-8°, pap. vél., 30 fr. (tiré à 175 exemplaires).
Le même, pap. vél. avant la lettre, 36 fr. (tiré à 25 exemplaires).
Le même, sur pap. nom de Jésus, 24 fr. (tiré à 350 exemplaires).
Le même, sur carré d’Essone, 12 fr. (tiré à 500 exemplaires).
On invite ceux qui seront jaloux d’avoir les premières épreuves, de faire retirer leurs exemplaires, le 15 frimaire prochain, ou, si bon leur semble, de se faire inscrire d’avance.
Les Actes de Apôtres n’ont été tirés qu’à moitié nombre de celui des Évangiles.

Cette annonce nous fournit les prix : de 12 à 100 francs pour un tome, et les tirages : au total 1162 exemplaires, dont 112 in-4°, et 87 exemplaires avec les gravures avant la lettre (62 in-4°, et 25 in-8°) – pour le cinquième tome uniquement. On peut en déduire que les quatre premiers tomes ont été tirés à 1700 exemplaires au moins (en doublant les chiffres de tirages des exemplaires in-8°). On peut penser que les chiffres des exemplaires de luxe des premiers tomes diffèrent peu de ceux du cinquième tome – d’où peut-être le chiffre de 18 ou 12 exemplaires qu’on trouve parfois mentionné dans les bibliographies. On voit la grande différence de prix du papier : le papier vélin « nom de Jésus » est vendu au double du papier d’Essone. Pour comparaison, le premier tome, fourni en 21 livraisons, coûtait donc 30 francs (papier ordinaire) à 42 francs (papier vélin) : ces prix sont ceux des exemplaires in-8°.

En principe, « nom de Jésus » est un format de papier, qui porte le filigrane IHS, de dimension environ 528 mm sur 704 cm, ce qui correspond pour un tirage in-4° à 26 cm sur 35 cm environ (et moins après reliure).

Beaucoup des gravures sont datées, de 1790 à 1793 pour les quatre premiers tomes ; de l’an 6 à 1801 pour le cinquième tome, ce qui est cohérent avec l’annonce publiée le 25 brumaire an 10. Les gravures sont insérées dans un double filet, gras et maigre ; de taille 88 mm sur 143 mm (environ). La cuvette mesure 175 mm sur 250 mm. Ces gravures existent en plusieurs états (jusqu’à six états) dont principalement :

– l’eau-forte pure,
– l’état avant la lettre de la tablette,
– l’état terminé.

Nb : Les bibliographies ne recensent que 12 exemplaires comportant les gravures avant la lettre et les eaux-fortes pures – de même, l’épitre n’est apparemment présente que dans 12 à 18 exemplaires suivant la source.

Exemplaire Renouard, avec les dessins originaux de Moreau.

Cohen, comme Brunet, dans sa longue notice, cite l’exemplaire du comte de la Bédoyère, qui figure dans sa vente de 1862 :

Les dessins originaux de Moreau se trouvent, joints aux trois états des figures, dans un bel exemplaire en maroquin vert de Bozérian ayant appartenu successivement à Detienne (1807, n. 67:486 fr) à Renouard (1854, n. 14 : 1640 fr.) au comte de la Bédoyère (1862, n. 5 : 1900 fr) et à Léon Rattier ; il a été payé 9800 fr. par M. Henri Beraldi, à la vente de ce dernier amateur (1909. n.56).

Brunet cite également cet exemplaire, dans la collection Detienne, il était alors relié en maroquin rouge, et ne comprenait que les quatre premiers tomes. Renouard nous donne plus d’informations dans son catalogue :

Le Nouveau Testament en latin et en français, traduit par Sacy. Paris, de l’imprimerie de Didot le jeune, 1793, 5 vol. in4. Gr. pap. vél. fig. mar. vert, tabis, dent.
On assure que des dix-huit exemplaires qui de cette brillante édition ont été tirés sur grand papier, in-4., douze seulement ont en tête la dédicace à l’Assemblée constituante, qui n’est point dans les autres du même format. Celui-ci, dans lequel se trouve la dédicace, a le précieux avantage de contenir, outre les figures avant et avec la lettre et eaux-fortes, les cent douze dessins originaux de Moreau le jeune, tous d’une grande beauté et d’une parfaite conservation. La reliure des cinq volumes est uniforme et très belle.
J’avois d’abord acquis les quatre volumes des Évangiles, avec quatre-vingt quatre dessins, et reliés. Depuis, M. Moreau me céda les vingt-huit dessins des Actes des apôtres, ce qui compléta cette belle et riche suite.
Si j’eusse fait relier moi-même les quatre premiers volumes, je me serois contenté des figures avant la lettre, avec les eaux-fortes, sans ajouter les figures avec la lettre, qui me semblent un accessoire tout-à-fait superflu, une surcharge plutôt qu’un ornement.

On voit qu’entre la bibliothèque de Detienne et celle de Renouard l’exemplaire a changé de reliure… on alors Brunet s’est trompé de couleur. Et on note également la différence du nombre d’exemplaires avec l’épitre : 18 chez Brunet, 12 chez Renouard.

On peut suivre cet exemplaire au cours du temps. Voici sa description dans le catalogue de la Bédoyère :

5. Le Nouveau Testament (les Évangiles et les Actes de Apôtres), en latin et en françois, traduit par le Maistre de Sacy. Paris, impr. de (P.-Fr.) Didot jeune, 1793-1798, 5 vol. in-4, gr. pap. vél. mar. vert, à compartiments, tabis, tr. dor. (Bozérian.)
Précieux exemplaire, l’un des 12 imprimés sur grand in-4°, avec l’adresse à l’Assemblée nationale. Aux figures (avant, avec la lettre et eaux-fortes) sont joints les CENT DOUZE DESSINS ORIGINAUX de MOREAU jeune, tous d’une grande beauté et d’une parfaite considération.
Exemplaire de Renouard.

Le livre a figuré en 1949 au catalogue de Nicolas Rauch ; puis dans la vente de la bibliothèque Couppel du Lude, chez Alde, le 23 novembre 2009, sous le numéro 114. De nombreux dessins sont reproduits. Voici la notice :

114. NOUVEAU TESTAMENT (Le) en latin et en français traduit par Sacy. Paris, Imprimerie de Didot le jeune, Saugrain, 1793-1798. 5 volumes in-4, maroquin vert clair à long grain, jeu de quatre filets droits et courbes sur les plats avec éventail aux angles et décor losange-rectangle dessiné par un filet, dos à doubles nerfs mosaïqués de rouge, richement orné aux petits fers, cadre de maroquin intérieur avec roulette, doublure et gardes de tabis rose, la doublure ornée d’une roulette, tranches dorées (Bozerian).
Très belle édition ornée de 4 frontispices et de 108 figures par Moreau le jeune, gravées par Baquoy, Dambrun, Delaunay, Delignon, Delvaux, Duhamel, Dupréel, Giraud, Godefroy, Halbou, Hubert, Langlois, Longueil, Petit, Simonet, Thomas, Tilliard et Trière.
UN DES 12 EXEMPLAIRES EN GRAND PAPIER VÉLIN DE FORMAT IN-4 avec l’épître à l’adresse de l’Assemblée nationale.
PRÉCIEUX ET UNIQUE EXEMPLAIRE CONTENANT LA SUITE COMPLÈTE DES 112 MAGNIFIQUES DESSINS ORIGINAUX DE MOREAU LE JEUNE. Exécutés à la plume et à la sépia, ils sont tous signés et datés de 1790 à 1797 ; contrecollés sur des feuilles minces, ils sont joints aux trois états des figures : eaux-fortes (sauf 6), avant la lettre (29 doubles) et avec la lettre (sauf 30). Élégante reliure en maroquin vert clair de Jean-Claude Bozerian, qui a signé son ouvrage par cette inscription séquentielle en petites capitales dorées réparties en queue du dos des quatre premiers volumes : Impri. à Paris en 1793 / avec les dess. de Moreau / et relié par Bozerian / l’an 3 de la Repu. Fran.
Des bibliothèques Detienne (1807, n° 67), Antoine-Augustin Renouard (1854, n° 14), comte de La Bédoyère (1862, n° 5), Léon Rattier (1909, n° 36), Henri Beraldi (II, 1934, n° 189), Albert Besombes et Taüber. L’exemplaire a figuré dans le catalogue Nicolas Rauch (III, 1949, n° 193).

Sur une estimation de 70 000 euros, il a été adjugé 192 000 euros.

Cet exemplaire, outre les dessins originaux de Moreau, contient l’épitre dédicatoire à l’Assemblée Nationale, qui semble donc peu courante.

Autres exemplaires remarquables.

Dans la vente après décès de Belin, libraire, en 1797, dont le catalogue est rédigé par de Bure, on trouve ces exemplaires :

De ces trois exemplaires (c’est le stock d’un libraire) on peut retenir le premier :

38. [titre] Paris, de l’imp. de Didot jeune, 1793, 4 vol. in-4. br. Gr. Pap. Vélin, figures avant la lettre. Il n’y a eu que 18 exemplaires tirés sur ce papier. L’épitre dédicatoire s’y trouve.

Dans la bibliothèque du comte de la Bédoyère :

On trouve dans un catalogue de la Bédoyère d’avril 1837 un autre exemplaire de cette édition :

6. Le nouveau Testament, en latin et en françois, trad. par Le Maistre de Sacy. Paris, Saugrain, 1791-1801, 5 vol. in-4. gr. pap. vél. fig avant la lettre et eaux-fortes, dem. rel. dos de mar. r. non rogn.
L’un des dix-huit exemplaires avec l’épitre à l’Assemblée nationale.

On notera que la date d’édition du cinquième tome est correctement citée – 1801 et non 1798.

Exemplaire avec note de de Bure :

Un autre exemplaire en grand papier, passé en vente chez Cornette de Saint-Cyr, le 25 avril 2014, sous le numéro 87, nous donne des précisions précieuses. Voici sa description :

Le Nouveau Testament En Latin Et En FRANÇAIS… Paris, Didot Jeune, Saugrain, 1793-1798. 5 volumes petit in-folio, maroquin rouge, triple filet doré en encadrement, dos à 5 nerfs richement ornés aux petits fers, large dentelle dorée intérieure, tranches dorées (Allô). Traduction par Louis-Isaac Lemaistre de Sacy. 4 frontispices et 108 figures hors texte d’après Moreau le Jeune gravées par Baquoy, Dambrun, Delaunay, Delignon, Delvaux, Duhamel, Dupréel, Giraud, Godefroy, Halbou, Hubert, Langlois, de Longueil, Petit, Simonet, Thomas, Tillard et Trière. Un des quelques exemplaires au format in-4, dont d’après Cohen il n’aurait été tiré que 12 exemplaires. Il est ici tiré en grand papier vélin et contient toutes les figures avant la lettre. Notre exemplaire est enrichi d’une suite de 96 figures, avant la lettre, d’après Monsiau et Marillier. Ces figures parurent dans l’édition de La Sainte Bible…, de 1789-1804 et dans l’édition de 1805 chez Gay, Ponce et Belin, à Paris, pour le Nouveau testament de N.S. Jesus-Christ. L’exemplaire contient une note manuscrite jointe sur un feuillet non relié dans l’ouvrage avec les mentions suivantes : « collationné complet le 24 octobre 1825. J. J. de Bure l’ainé – (en dessous) On a imprimé, après la publication de cet ouvrage, un épître dédicatoire à l’assemblée nationale, qui ne se trouve pas dans cet exemplaire – (en dessous) Très rare de ce format dont il n’a été tiré que douze exemplaires – (en dessous d’une autre main) Elle s’y trouve maintenant, je l’ai fait copier par un calligraphe distingué, Mr Quertinier à Valencienne ». L’exemplaire contient effectivement, inséré après le titre du tome I, 4 feuillets remarquablement manuscrits intitulés Epitre dédicatoire. Seul un examen approfondi permet de déceler qu’il ne s‘agit pas de feuillets imprimés. Un autre exemplaire comparable en cartonnage d’attente figurait au catalogue de la première vente De Bure du 22 janvier 1835 sous le n°39. Il est possible que notre exemplaire soit celui de ce célèbre éditeur, relié d’abord par Allô, puis complété de son épître. Contrairement à la collation donnée par Cohen, Reynaud indique qu’ « il n’est pas certain que le tome V renferme un frontispice ». De la bibliothèque David Lionel Salomons Bart avec son ex-libris. Très bel exemplaire en parfaite condition.Estimation : 6 000 – 8 000 Adjudication : 5 700 €

Le livre est décrit comme « petit in-folio ». Ses dimensions ne sont pas indiquées mais on peut estimer d’après la photo reproduite que la hauteur de la page est d’environ 32 cm (en se basant sur la taille de la gravure, 14,3 cm) – ce qui en fait effectivement un livre de très grand format, ce qui doit correspondre, dans l’annonce de 1801, à un des douze exemplaires au format « nom de Jésus ».

D’après la note de de Bure, l’épitre aurait donc été imprimée après coup, ce qui expliquerait sa rareté.

Exemplaire avec figures avant la lettre, relié par Chaumont :

Un exemplaire en grand papier, avec les figures avant la lettre et l’épitre dédicatoire, est passé en vente en 2023 chez Sotheby’s :

Le Nouveau Testament en latin et en français, traduit par Sacy.
Paris, de l’imprimerie de Didot jeune, chez Saugrain, 1793 et 1798.
5 volumes in-4 (304 x 226 mm). Maroquin rouge à grain long, encadrement doré composé d’une guirlande et d’un double filet, dos lisse orné de fers au triangle et à la croix sur semés de fleurettes, roulettes aux palmettes, mention au pied en lettres dorées « figures avant la lettre », chaînettes dorées sur les coupes et en encadrement intérieur, tranches dorées (Antoine Chaumont, étiquette à son adresse « rue du Foin St Jacques n° 18 / Hôtel de la Reine Blanche à Paris »).
4 frontispices et 108 figures de Moreau le jeune, gravés par 18 artistes distincts, dont Baquoy, Dambrun, Delaunay, Delvaux, Dupréel, Halbou, Longueil, Simonet, Tilliard, etc. Les planches portent presque toutes une date, entre 1790 et l’an IX. Elles sont en premier état avant la lettre des tablettes. « Avis pour placer les figures » à la fin du tome IV (la table indique un frontispice et 24 figures dans le 3ème volume).
Avec le tome V, contenant Les Actes des Apôtres, publié en 1798, moins commun.
Un des rares exemplaires du tirage in-4, avec les figures avant la lettre de la tablette (Cohen indique un tirage à 12 exemplaires, accompagnés des eaux-fortes, non présentes ici).
Bel exemplaire dans une reliure de l’époque aux symboles chrétiens réalisée par Antoine Chaumont, actif au début du XIXe siècle, dont les reliures en veau fauve furent saluées par Brunet en 1802 lors de l’Exposition des produits de l’industrie française de 1802 (ancêtre des Expositions Universelles actuelles).

La notice ne le précise pas mais l’exemplaire contient bien l’épitre, si rare semble-t-il. Estimé 2000 à 3000 euros, le livre n’a pas été adjugé.

détail du dos de la reliure, avec la mention « figures avant la lettre ».

Cet exemplaire avait figuré en 1839 dans la vente de la bibliothèque du chanoine Pierre-Jean Bernaert, secrétaire de Maurice de Broglie, évêque de Gand :

20. Le nouveau Testament, en latin et en français, traduit par Sacy, édition ornée de figures gravées sur les dessins de Moreau le jeune. Paris, imprimerie de Didot Jeune, 1793-1798. 5 vol. in-4. relié en maroquin rouge, d.s.tr. et pl. par Ant. Chaumont, à Paris. Chaque vol. est dans un étui. Superbe édition, sur papier vélin, avec les figures avant la lettre.

On notera que les étuis ont disparu entre temps – mais il paraît probable que ce soit le même exemplaire.

Defer de Maisonneuve, les débuts du livre illustré de gravures en couleur.

André Defer de Maisonneuve, né en 1749, est un éditeur parisien de la fin du XVIIIe siècle ; son catalogue pour l’année 1788 est connu (numérisé sur Gallica) – on y trouve, notamment les œuvres de Jean-Jacques Rousseau, et l’annonce d’une bible en souscription, imprimée par Didot Jeune. Quelques ouvrages légers sont présents « avec figures », d’un prix en général raisonnable.

Ce catalogue est précieux également parce qu’il donne les prix de ces publications ; en général autour de de deux livres par volume. Il y a des différences, comme par exemple les petites Aventures de Jérôme Sharpe, quatre livres, mais qui renferme 18 figures gravées. De même, le dictionnaire de musique de Rousseau est vendu douze livres, mais c’est un in-4° relié, avec musique gravée. Les œuvres complettes de Rousseau, avec figures, 25 volumes in-12, relié, est vendu 75 livres, en 20 volumes in-8°, 120 livres.

A ce moment, toutes les éditions « avec figures » sont illustrées de gravures en noir. Il existe des exemplaires avec les gravures coloriées, mais ces gravures sont coloriées à la main ; il ne s’agit pas de « gravures en couleur », c’est-à-dire de gravures tirées en un seul passage, comprenant le noir et les couleurs.

En voici un exemple : deux gravures tirées en noir ; celle de gauche coloriée (illustration pour les amours de Psyché et de Cupidon, édition de Pierre Didot au Louvre, en 1797).

(petite parenthèse généalogique : Didot le jeune, ici, est Pierre-François Didot, né en 1731, l’oncle de Pierre Didot, né en 1761, dont bien plus jeune que Didot « le jeune »)

La technique d’impression de gravures en couleur existe pourtant depuis plusieurs décennies, mais elle est appliquée rarement, et (en 1790) n’a encore jamais été employée pour un livre. Il s’agit de la gravure à la poupée : les couleurs sont posées directement sur la plaque, aux emplacements voulus, au moyen d’un tissu roulé (qu’on appelle une poupée). Il faut ensuite enlever le surplus d’encre (ne laisser de l’encre que dans les creux de la plaque), sans enlever l’encre dans les creux, et sans mélanger les couleurs… ceci à chaque impression d’une gravure !

En voici une illustration, tirée du site des ateliers Moret :

Psyché et Cupidon, 1791.

En 1791, Defer de Maisonneuve annonce une nouvelle édition de ce qui est un classique : les Amours de Psyché et de Cupidon. Voici l’annonce publiée dans la Feuille du jour, le 10 décembre 1791 (source Gallica) :

LIVRES NOUVEAUX
Les amours de Psyché et de Cupidon, par Lafontaine , édition ornée de figures imprimées en couleurs à la manière angloise, d’après les tableaux de M. Schall. Un volume in-4°, grand papier Nom de Jésus ; de l’imprimerie de M. P.F Didot le jeune , prix, broché en carton et satiné, 27 liv. 10 sous. Il y a quelques exemplaires en papier vélin à 75 liv. A Paris, chez Defer de Maisonneuve, libraire, rue du Foin Saint-Jacques, la porte cochère au coin de la rue Bouttebrie.
Il paroît que M. Defer de Maisonneuve cherche à se distinguer par l’entreprise de superbes éditions : il a déjà éprouvé que la difficulté des temps n’es pas un obstacle au succès, quand on ne néglige ni soins ni dépenses pour se l’assurer. Cette édition des Amours de Psyché, de Lafontaine, est ornée de quatre gravures charmantes, d’après les tableaux de M. Schall, et ces estampes étant imprimées en couleur, sont elles-mêmes de véritables tableaux. Pour le texte, il sort des presses de M. Didot le jeune ; cette annonce suffit pour faire complettement l’éloge de la partie typographique.

Le prix annoncé (27 livres pour les exemplaires courants) pour un ouvrage non relié, illustré de seulement quatre gravures, indique clairement la différence avec les publications habituelles du moment – c’est vraiment un objet de luxe.

Il s’agit donc d’un in-4° (25 cm sur 33 cm environs, suivant le relieur..) de 163 pages ; à la fin peut être inséré le prospectus de la publication suivante de Defer de Maisonneuve, le Paradis perdu de Milton.

Le texte est donc illustré de quatre gravures d’après les tableaux de Jean-Frédéric Schall (né en 1752 à Strasbourg, mort à Paris en 1825), peintre spécialisé dans les sujets « légers ». Voici ces gravures :

Le rendu est très différent d’une gravure coloriée, et comme l’affirme l’annonce, ce sont pratiquement « de véritables tableaux ».

le Paradis perdu, 1792.

Defer de Maisonneuve prépare rapidement l’ouvrage suivant : le Paradis perdu de Milton. Le prospectus correspondant est joint à certains exemplaires de Psyché :

LE PARADIS PERDU,
POËME
PAR MILTON.
EDITION EN ANGLOIS ET FRANçOIS.
Deux volumes in-4° grand papier.
Ornés de douze estampes imprimées en couleur d’après
les Tableaux de M. SCHALL.
A PARIS,
chez DEFER DE MAISONNEUVE, libraire rue du Foin St-Jacques, N°11.
Cette édition, conforme aux Amours de Psyché et de Cupidon,
paroîtra dans le courant de 1792.
Les personnes qui voudroient se faire inscrire peuvent le faire à l’adresse ci-dessus.
ON NE PAIE RIEN D’AVANCE.
L’édition sera livrée toute satinée.

La publication est annoncée dans le Mercure Français, le 16 décembre 1792 (source Gallica) :

Le Pardis, perdu, poëme de Milton, édition en anglais et en français, ornée de 12 estampes imprimées en couleur, d’après les tableaux de M. Schall ; 2 vol. grand in-4°, papier velin ; prix 90 liv. broché, et 120 liv. relié. A Paris, chez Defer de Maisonneuve, rue du Foin Saint-Jacques, n° 11.
Cette magnifique édition est un des chefs-d’oeuvres typographiques dont le libraire Maisonneuve nous enrichit depuis quelques années, et qui ont attiré l’attention des amateurs. La traduction qu’il réimprime est celle de Dupré de Saint-Maur, qui est estimée.

On voit que le prix est nettement plus important : on passe de 27 livres le volume à 45 livres ; mais il est satiné – et chaque volume est orné de six gravures, au lieu de quatre pour Psyché.

Le livre est donc un in-4° (25 cm sur 34 cm), en deux volumes, de viii-391 et 377 pages, débutant par la vie de Milton. Chacun des douze chants est illustré d’après un tableau de Schall. Il me semble que ces gravures sont mieux réalisées que pour le Psyché – avec des couleurs plus profondes. Mais cela tient peut-être au sujet, et à la tonalité des tableaux de Schall.


Après cette édition Defer de Maisonneuve poursuivra cette série ; ce sera le sujet d’un prochain article.

l’ornement des petites bibliothèques, une collection de Didot.

Voici une collection d’ouvrages, publiée par Pierre Didot, qui sera plus facile à compléter que toutes les autres collections publiées par cette famille d’éditeurs, qui aimait bien regrouper les livres en séries, comme par exemple les célèbres Collection du Dauphin, ou Collection d’Artois.

Cette collection est fièrement appelée

L’ORNEMENT
DES PETITES
BIBLIOTHEQUES.

COLLECTION PRÉCIEUSE,
EN PETIT FORMAT,
DES PLUS JOLIS ROMANS,
ET AUTRES OUVRAGES CHOISIS
EN VERS ET EN PROSE.


Le premier titre publié est un grand classique, déjà publié de nombreuses fois par Didot : Daphnis et Chloé, de Longus.

C’est un petit in-12 (8cm sur 13,5 cm) de 214 pages, dont bizarrement les 8 premières, correspondant à la préface, sont numérotées en chiffres romains (mais compris dans les 214 pages). Le livre est imprimé par P. Didot l’aîné (Pierre Didot, fils de François-Ambroise), à Paris, « au Palais national des Sciences et arts », c’est-à-dire au Louvre, où Pierre Didot a pu installer ses presses, et où il produira les fameuses « éditions du Louvre ». Il est daté de l’an VIII, soit 1799 – 1800.

Le livre n’est pas illustré, même si il n’est pas rare d’en rencontrer des exemplaires dans lesquelles des gravures ont été insérées.

Le livre est de petit format et le texte lui-même est imprimé en petits caractères – les marges restent importantes. C’est effectivement un bijou de typographie.

Il faut noter que cette même année Pierre Didot édite une version d’un tout autre format de ce texte, illustrée par Prud’hon et Gérard. Les deux éditions sont bien différentes…

Ce texte célèbre est le premier de cette nouvelle Collection ; et c’est aussi le dernier, Pierre Didot n’ayant pas donné de suite à ce titre. Cet Ornement des petites bibliothèques est donc la collection la plus facile à compléter de toutes celles éditées par les Didot !

Gothique, mon amour – 2, le livre mignard

Quelques années après le livre d’amour, et alors que celui-ci est toujours en vente, l’éditeur Janet publie un second recueil, du même genre, toujours pour les étrennes de la nouvelle année – en l’occurrence la nouvelle année 1827.

Ce nouveau livre est cette fois-ci clairement identifié et présenté. Le livre commence en effet par une préface, de quatre pages, imprimée en caractères italiques, qui rappelle le Livre d’amour, et présente ce nouveau recueil comme sa suite ; cette préface est signée Charles-Malo, qui revendique ainsi la paternité du premier recueil – cette préface est reproduite en entier en annexe de cet article.

Le livre présente vingt-cinq extraits de fabliaux ; certains célèbres, comme « Aucasin et Nicolete » (sic), d’autres publiés pour la première fois, comme le revendique la préface (Grisélidis). Parmi ces fabliaux se glissent quelques poèmes de Ronsard, Du Bellay, Clément Marot. Il est complété d’un glossaire important, sur vingt-deux pages ; mais il n’y a plus de biographie des auteurs ; peut-être parce qu’une majorité des pièces proposées est anonyme.

Le livre est un in-12 de (8)-192 pages ; après le faux-titre, une gravure en couleurs, sur papier épais, fait office de page de titre ; les quatre pages de la préface sont suivies des deux pages de la « liste des titres » ; puis les pièces présentées commencent, à la page 1 jusqu’à la page 170 ; de la page 171 à la page 192 nous trouvons le glossaire.

Ce recueil est imprimé par Firmin Didot, rue Jacob, numéro 24 (mention à la dernière page du glossaire) et édité par Louis Janet, libraire, rue Saint-Jacques, numéro 59 (mention sur la gravure-titre). Il est annoncé fin 1826, pour les étrennes 1827.

bibliographie de la France, 18 octobre 1826. Gallica.bnf.fr.

Le catalogue de Janet et Cotelle, daté du 15 décembre 1826, mentionne le livre :

source : gallica.bnf.fr

On voit que les reliures proposées sont les mêmes que pour le Livre d’amour ; on en verra quelques exemples dans l’article correspondant. Voici un exemple de reliure en « veau élégant » :

Il existe des exemplaires avec des reliures spéciales ; par exemple celui de Beraldi :

Gravures.

L’illustration comporte six gravures en plus de la gravure-titre. Elles ne sont pas légendées, le dessinateur n’est pas identifié ; et leur disposition dans le livre varie d’un exemplaire à un autre. Sur quatre d’entre elles le graveur est identifié : Rouargue.

Voici les gravures avec la gravure de titre :

Autres mises en vente.

On voit que le livre est annoncé avec ses gravures en couleur. A aucun moment dans la liste des combinaisons proposées il est question de différences sur les gravures. Et pourtant, le livre sera proposé sous des formes sans doute moins onéreuses, soit avec les gravures en noir, soit avec une seule gravure, soit sans gravure…

Gravures en noir : Techener.

Il existe des exemplaires, dans lesquels la gravure-titre ne mentionne pas Janet, mais Techener, place du Louvre. Cette gravure est en noir, comme toutes les gravures du livre. C’est la seule différence avec les exemplaires « normaux » ; il s’agit de la même édition, seules les gravures différent.

Librairie universelle.

Il existe également une mise en vente avec une page de titre imprimée, à l’adresse de la Librairie Universelle, 30 rue de la Harpe. Dans cette présentation une des gravures, en noir, est placée en frontispice ; c’est la seule gravure du livre. Le tirage est le même que celui de Janet.

source : ebay (bsklub).

Mise en vente avec couverture verte.

Il existe une autre mise en vente, avec un nombre variable de gravures (de zéro à 3 pour les exemplaires examinés… ; pour ceux-ci Janet a fait éditer une couverture, de couleur verte, un faux-titre et une page de titre – pas par Didot, mais par l’imprimerie d’Amédée Saintin, 58 rue Saint-Jacques – on note que c’est le voisin de Janet, qui est établi au numéro 59.

Le travail de cet imprimeur s’est limité à cette couverture et ce feuillet ; tout le reste du livre est bien celui édité par Didot. la page de titre mentionne « LIVRE MIGNARD OU LA FLEUR DES FABLIAUX Avec gravures » ; en fait les gravures en question peuvent être limitées aux quelques petites vignettes sur bois qui parsèment le livre…

Détails du livre.

Pour ces livres (comme déjà pour le Livre d’amour) Firmin Didot a rompu avec le style classique auquel son nom est associé. Voici quelques pages représentatives : la première page du premier texte, la dernière page du vocabulaire avec la mention de l’imprimeur, la liste des titres, la première page de la préface.

Préface.

La préface de Charles Malo mérite d’être citée :

Dans l’espoir de nous rendre agréable aux Dames, nous avons, il y a quelques années, réuni, sous le titre de Livre d’Amour ou Folastreries du vieux tems, un choix de lais, rondels, virelais et ballades les plus célèbres des 11e, 12e, 13e, 14e et 15e siècles. Ce recueil, aussi séduisant par le luxe et l’élégance de son extérieur que par la grace enchanteresse des poésies dont il se composait, devait plaire au public. Son succès a surpassé notre attente.

Encouragé par cet heureux essai, nous avons depuis conçu l’idée d’offrir aux dames une espèce de suite au Livre d’Amour. Les anciens fabliaux, modèles inimitables de gracieuseté, de finesse, de naïveté, de gaieté piquante, avaient été recueillis déjà par un littérateur estimable, mais en un corps d’ouvrage très-volumineux ; d’ailleurs, faut-il bien l’avouer : tout ce qui peut intéresser un ami passionné des lettres, ne saurait, sans inconvénient, être mis entre les mains de toutes les classes de lecteurs ; un grand nombre de ces fabliaux ne sont pas même de nature à être lus par des Dames.

Nous nous sommes donc imposé la loi de ne puiser qu’avec une extrême discrétion dans les trézsors des premiers siècles de notre littérature. Sous le titre de Livre Mignard ou Fleur des Fabliaux, nous présentons aux Dames un choix des anciens Fabliaux les plus célèbres.

On trouvera dans ce recueil les Fabliaux de Griselissis, du Chevalier à la Trappe et de Sémiramis, qu’on chercherait en vain dans l’édition en 4 volumes de Barbazan. Nous sommes le premier qui les ayons fait imprimer : nous les avons soigneusement collationnés sur les originaux.

Un petit Glossaire, placé à la fin de ce volume, facilitera à nos lecteurs l’intelligence des mots don ils ne pourraient de suite saisir le sens.

Nous désirons que le public daigne accueillir ce second recueil aussi favorablement que le premier.

Charles-Malo.

Gothique, mon amour… – 1. Le livre d’amour.

Petits bijoux édités de 1820 à 1830, dans le style troubadour.

Ce titre fait référence à l’exposition « L’invention du passé, gothique mon amour », au musée de Brou à Bourg en Bresse, en 2014, après un premier volet au musée des Beaux-Arts de Lyon. Dans l’avant-propos du catalogue, Philippe Bélaval indique :

Ce style aura son pendant dans tous les arts mineurs, comme la tradition des petits livres d’étrennes, petits bijoux publiés vers la nouvelle année, destinés à être offerts, et donc présentés sous des formes à la fois simples (petits livres sans grande prétention) et aussi riches que possible (cadeaux à offrir).

Cette série de petits articles ne va pas faire le tour complet de son sujet, mais en donner un petit aperçu à travers quelques titres représentatifs. Le second article publié est Gothique, mon amour – 2, le livre mignard.

Le livre d’amour, ou folastreries du vieux temps.

Le premier titre évoqué est bien représentatif de ce genre. Il s’agit d’un recueil de pièces diverses, principalement en vers (mais quelques morceaux de prose sont intercalés), datant du XIe au XVIIe siècle. 41 extraits sont donnés, et la plupart des vedettes attendues sont présentes : Louise Labé, Villon, Racan, Marguerite de Navarre, Clément Marot, Ronsard, Charles d’Orléans.. Il n’y a pas de texte de présentation, ni de préface – le nom du compilateur n’est pas précisé – il s’agit de Charles Malo. Le choix, présenté par ordre alphabétique, commence abruptement à la page 1.

De même il n’y a pas vraiment de page de titre ; à la place se trouve une gravure à pleine page, sur laquelle le titre est indiqué dans un cartouche ; l’éditeur (à Paris chez Louis Janet libraire rue St Jacques n° 59) est indiqué au pied de la gravure, en couleurs. Sous la gravure est indiqué : peint par Aug. Garneray.

Le livre est un petit volume in-12 (9 cm sur 15 cm) de (6)-188-(2) pages.

Aux pages 169 à 173 figure un vocabulaire, et aux pages 174 à 188 une table des matières, enrichie d’éléments biographiques. Le livre est imprimé par Firmin Didot, rue Jacob, n° 24. Il est annoncé en fin d’année 1821, pour les étrennes du nouvel an 1822.

Le livre est illustré du titre-frontispice évoqué, et de six gravures, hors numérotation, imprimées sur papier épais, sous serpentes, représentant des scènes de quelques-unes des pièces choisies, placées dans un encadrement gothique (qu’on appellera bientôt « à la cathédrale »), différent pour chaque gravure – et imprimé dans un ton différent également, d’après les dessins de Garneray.

Les gravures représentent :

  • Clément Marot lisant sa ballade à Marguerite de Navarre,
  • Clotilde de Surville et son enfant,
  • François 1er traçant sur des vitraux son célèbre distique,
  • Alain Chartier endormi, recevant un baiser de Marguerite d’Ecosse,
  • Charles d’Orléans au pied d’une belle,
  • Thibault, comte de Champagne, composant des vers.

Ces gravures sont coloriées à la main et les tons peuvent différer d’un exemplaire à l’autre..

Ce petit livre d’étrennes est proposé sous différentes présentations, de la plus simple à la plus luxueuse : pour cela l’éditeur va jouer sur les gravures, plus ou moins coloriées, et sur la reliure, du simple cartonnage à la reliure en maroquin – toutes ces reliures étant des reliures « éditeur ».

Voici un extrait du catalogue Janet pour les étrennes 1822 (source gallica.bnf.fr) :

Les prix indiqués varient uniquement suivant la reliure :

  • cartonné avec étui : 15 francs.
  • relié en veau, élégant : 18 francs.
  • en moire : 21 francs.
  • en maroquin, étui : 22 francs.
  • avec médaillon peint : 36 francs.

Le livre sera proposé plusieurs années et la présentation changera. Voici ce que Janet propose pour l’année 1926 :

  • cartonné, avec étui : 15 francs.
  • papier glacé, filet d’or : 18 francs.
  • en moire : 21 francs.
  • relié en veau, élégant : 21 francs.
  • avec arabesques très-riches : 33 francs.

Le maroquin n’est plus mentionné ; le prix le plus élevé correspond certainement à une reliure en peau, mais laquelle ? Les prix vont donc du simple au double (ou plus) ; il y en a effectivement pour tous les publics.

Reliures de l’éditeur.

Voici quelques exemples des reliures proposées :

reliure en veau – peut-être « avec arabesques très-riches » – source Tajan.

A noter que la notice de Tajan semble confondre « veau élégant à 18 francs » avec « arabesques très riches » à 33 francs…

reliure en maroquin – source Drouot – Villanfray Pommery
reliure en maroquin avec arabesque. Source Pierre Bergé.
reliure en veau – source Ka Mondo.

La notice indique « cuir de Russie » – je pense plutôt qu’il s’agit de la reliure en veau élégant à 18 puis 21 francs.

reliure en soie moirée – « moire » dans le tarif, à 21 francs.

cartonnage décoré et doré, dans un étui : les deux côtés de l’étui. Source librairie Blaizot. Doit correspondre au cartonnage « papier glacé, filets d’or » à 18 francs du tarif.

Cartonnage rose, décor à la cathédrale imprimé en bleu, identique sur le premier et le dernier plat, étui de carton rose. C’est le décor décrit par Carteret avec une variante : celui-ci n’a pas de rehauts dorés. Doit correspondre au « cartonné avec étui » à 15 francs du tarif.

Exemplaire en simple cartonnage. Source Catawiki. Ce type de cartonnage simple n’est apparemment pas indiqué dans le tarif. Peut-être un tirage plus tardif ?

Gravures.

Il faut noter, même si ce n’est pas indiqué dans le tarif, que la reliure n’est pas le seul élément de personnalisation.

Voici les gravures d’un exemplaire simplement cartonné (cartonnage rouge simple):

Le titre est écrit en bleu ; les encadrements gothiques ne sont pas peints – à comparer aux gravures de l’exemplaire en cartonnage rose données en début d’article.

Voici quelques gravures de l’exemplaire relié en moire :

Le titre est écrit en lettres dorées ; les encadrements sont peints.

Le prix de la reliure n’est apparemment pas en rapport avec la richesse du coloris des gravures ; l’exemplaire en cartonnage rose, le moins cher du tarif, a le frontispice en doré et les gravures avec encadrements coloriés. On trouve des exemplaires en peau (veau ou maroquin) avec le frontispice peint en bleu, et les gravures avec encadrements coloriés.

Une hypothèse : le livre est publié plusieurs années de suite ; au début, tous les exemplaires ont le frontispice en doré et les bordures coloriées ; dans un second temps le frontispice doré est abandonné ; ensuite, une version économique est vendue, les bordures n’étant plus coloriées (et cela peut correspondre au cartonnage très simple déjà évoqué).

Janet va continuer dans cette voie en publiant fin 1826 le Livre mignard – qui est présenté dans Gothique, mon amour – 2, le livre mignard.

Paul et Virginie : deux exemplaires exceptionnels.

Le 14 avril 2023, la SVV Giquello et associés (expert : Dominique Courvoisier) propose, dans une vente consacrée en partie à la bibliothèque d’Adolphe Bordes, les deux lots suivants (qui, eux, ne proviennent pas de cette bibliothèque) :

Lot 25. Estimation 4000 à 5000 euros. Adjugé 4423 euros avec les frais.

SAINT-PIERRE (Bernardin de). Paul et Virginie. Paris, De l’Imprimerie de P. Didot l’aîné, 1806. In-4, maroquin aubergine à long grain, très large encadrement autour des plats formé d’une succession de roulettes à froid et d’une bordure dorée à motifs néoclassiques, dos orné, nerfs soulignés de filets et d’une roulette dorée, les caissons ornés d’un fer quadrilobé doré aux mille points, roulette intérieure, tranches dorées (Simier).
Très belle édition, illustrée en premier tirage d’un portrait de l’auteur gravé par Ribault d’après Lafitte et de 6 figures gravées d’après Lafitte, Girodet, Gérard, Moreau le jeune, Prudhon et Isabey.
Un des quelques exemplaires avec les figures imprimées en couleurs et terminées au pinceau.
Cet état est rare, la liste des 55 souscripteurs n’indiquant que 10 exemplaires coloriés. Selon Portalis, Les Dessinateurs d’illustrations au XVIIIe siècle, c’est l’artiste Nicolas-Antoine Taunay (1755-1830), futur peintre officiel à la cour du Brésil, spécialiste des paysages, qui se chargea de mettre en couleurs ces estampes.
Très belle et fraîche reliure de Simier.
Prospectus de la publication (2 pages) relié au début du volume. Une note sur une garde indique que l’exemplaire aurait appartenu à Mademoiselle Mars, l’une des plus célèbres actrices de la première moitié du XIXe siècle, membre de la Comédie Française. L’ex-libris gravé collé dans la doublure serait le sien.
De la bibliothèque Edouard Rahir (III, 1935, n°908).
Rousseurs sur le portrait, quelques piqûres.

Le second lot exceptionnel concerne l’autre grande édition du même texte :

Lot 57. Estimation 5000 à 6000 euros. Non vendu.

SAINT-PIERRE (Jacques-Henri Bernardin de). Paul et Virginie. La Chaumière indienne. Paris, L. Curmer, 25 rue Sainte-Anne, 1838. In-4, en feuilles sous couvertures de livraison, boîte cartonnée formant livre recouverte de papier vert avec décor de fleurs gaufrées, tranches dorées, lacet de soie verte (Reliure de l’éditeur).
Célèbre édition, l’un des fleurons du livre illustré romantique. L’illustration, en premier tirage, comprend environ 450 vignettes gravées sur bois et 29 planches hors texte tirées sur chine monté, le tout gravé d’après Tony Johannot, Isabey, Meissonier, Français, Paul Huet, Marville, etc., plus une carte de l’Ile de France.
Précieux et très rare exemplaire conservé dans son état de parution, en livraisons, préservé dans la boîte cartonnée et gaufrée de l’éditeur, condition exceptionnelle.
Il possède toutes les couvertures de livraison (à savoir 29, la 30e selon Carteret n’ayant pas été imprimée), dont la 19e qui est différente des autres et qui est illustrée de la belle composition représentant l’apothéose de Virginie. Les 7 portraits des personnages principaux du roman, gravés sur acier et distribués à part, ne sont pas présents ici.
La boîte en carton, « aussi élégante que commode, pouvant se placer dans une bibliothèque », est recouverte d’un papier gaufré et la tranche est dorée à l’imitation des reliures. Très fragile, elle est ici préservée dans une chemise demi-maroquin fauve et un étui modernes.
Soulignons l’extrême rareté des exemplaires en feuilles de Paul et Virginie, dont la parution des trente livraisons s’est étalée sur un peu plus d’un an, du 10 octobre 1836 à décembre 1837. En effet, rares sont les souscripteurs de l’époque à ne pas avoir succombé à l’idée d’en obtenir un exemplaire relié, surtout lorsque l’on sait que Curmer proposait à ses clients un vaste choix de reliures, la plus convoitée étant celle frappée de la plaque dite à l’indienne conçue spécialement par Simier.
On notera que le feuillet de souscription pour la reliure est bien présent dans notre exemplaire : il est encore vierge et n’a pas été retourné à l’éditeur ; selon les termes de la souscription, on apprend que chaque souscripteur pouvait rapporter leurs livraisons même coupées, et prendre en échange des exemplaires reliés. Rousseurs claires à quelques couvertures, petits manques à la boîte.

Toutes photos : source Giquello/Interenchères.

Sur l’édition de 1806, on peut lire : Paul et Virginie, 1806, Didot. Sur un autre exemplaire exceptionnel de l’édition Curmer : Paul et Virginie, de Curmer : un exemplaire exceptionnel.

Le naufrage de Virginie, par Prud’hon.

Pierre Paul Prud’hon a fourni relativement peu de dessins pour servir d’illustrations ; ils sont recensés dans cet article : Prud’hon illustrateur.

Le 22 mars 2023, la SVV Artcurial met en vente, sous le numéro 17, avec une estimation de 50 000 à 80 000 euros, ce qui est peut-être la plus fameuse des illustrations : le dessin préparatoire pour le naufrage de Virginie, pour illustrer l’édition de 1806 de Paul et Virginie, par Didot.

Voici la description de ce lot (toutes images : source Artcurial) :

Pierre Paul PRUD’HON Cluny, 1758 – Paris, 1823
Le naufrage de Virginie
Lavis brun et rehauts de gouache blanche sur trait de crayon noir
Plusieurs anciennes étiquettes sur le montage au verso

Virginia’s shipwrecked, brown wash and white highlights, by P. P. Prud’hon
Hauteur : 20,20 Largeur : 16 cm

Provenance : Vente anonyme, Paris, 7 avril 1857, n° 65 ;
Collection Véron ; Sa vente, Paris, Hôtel Drouot, 17-18 mars 1858, n° 19 ;
Collection Henri Didier ; Sa vente, Paris, Hôtel Drouot, 15-17 juin 1868, n° 144 ;
Collection de Madame Denain ; Sa vente, Paris, galerie Georges Petit, 6-7 avril 1893, n° 42 ;
Collection Léon Ferté ;
Vente anonyme ; Deauville, 28-29 août 1969, n° 71 ;
Vente anonyme ; Paris, Artcurial, 9 avril 2008, n° 140 ;
Acquis lors de cette vente par l’actuel propriétaire ;
Collection particulière, Bruxelles

Expositions : ‘Exposition de Paris’, 1860, n° 47
‘Exposition des œuvres de Prud’hon au profit de sa fille’, Paris, Ecole des Beaux-Arts, mai 1874, p. 114, n° 381
‘Exposition des arts du début du siècle’, Paris, 1891, n° 490
‘Exposition P. P. Prud’hon’, Paris, Petit Palais, mai-juin 1922, n° 168

Bibliographie : Edmond de Goncourt, ‘Catalogue raisonné de l’œuvre peint, dessiné et gravé de Pierre-Paul Prud’hon’, Paris, 1876, p. 245
Jean Guiffrey, ‘L’œuvre de P.P. Prud’hon’, Paris, 1924, p. 415, n° 1077, repr. pl. XXIX
Sylvain Laveissière, ‘Prud’hon ou le rêve du bonheur’, cat. exp., Paris, 1997, p. 131, mentionné dans la notice du n° 82

Commentaire : En 1806 parut chez Didot une édition de luxe du roman de Bernardin de Saint-Pierre, ‘Paul et Virginie’, dont l’illustration fut confiée à différents artistes, parmi lesquels François Gérard, Anne-Louis Girodet, Louis Lafitte, Jean-Michel Moreau le Jeune et Pierre-Paul Prud’hon. À l’exception de celui de Prud’hon, que nous présentons ici, les dessins originaux de cette édition sont reliés dans l’exemplaire sur vélin de l’auteur, conservé à la Bibliothèque nationale depuis 1949 (RES ATLAS-Y2-5). Préparatoire à cet ouvrage, cette feuille très aboutie fut gravée par Barthélémy Roger. Le dessinateur a ici représenté le tragique épisode de la mort de Virginie, lors du naufrage du Saint-Géran, navire de la Compagnie des Indes qui la ramenait de France vers l’Ile de France (actuelle ile Maurice) où elle avait grandit aux côtés de Paul, devenu son grand amour et qu’elle s’apprêtait à retrouver. Illustrateur attentif et talentueux, Prud’hon resta au plus près du texte de Bernardin de Saint-Pierre :  » Virginie, voyant la mort inévitable, posa une main sur ses habits, l’autre sur son cœur, et, levant en haut des yeux sereins, parut un ange qui prend son vol vers les cieux « .
Commandé en septembre 1804 à Prud’hon, le dessin dut être achevé en janvier 1805. Particulièrement abouti, il témoigne de l’immense talent de l’artiste pour le dessin, de sa grande maitrise technique et de son imagination fertile. Au centre de la feuille se tient l’héroïne du drame, Virginie, dont les cheveux et les vêtements s’envolent sous l’effet de la tempête, les plis de sa robe de fin tissu rappelant les drapés des sculptures antiques, tout comme sa gestuelle, faisant écho aux Vénus pudiques. La poupe du Saint Géran sur laquelle elle se tient s’enfonce dans les flots, traversée par l’écume magistralement rendue par la gouache blanche, tandis que des vagues émerge la tête de Paul, retenu par une corde par deux compagnons restés sur la rive. A l’arrière-plan se devine le paysage de l’ile, avec un imposant rocher au pied duquel se trouvent des palmiers dont les cimes sont retournées par le vent. Le romantisme affleure dans cette magistrale composition qui atteint son objectif en emportant les spectateurs que nous sommes au cœur de la tempête et du drame, au large de cette île de l’océan Indien.

Estimation 50 000 – 80 000 €

Nb : Le dessin reste invendu.

Sur l’édition de 1806, par Didot, on peut lire cet article : Paul et Virginie, 1806, Didot. Voici la gravure insérée dans l’ouvrage, gravée par Roger :

enchères – pour les amateurs de Didot.

Le 24 mars 2023, la SVV De Baecque et Associés organise une vente à Paris Drouot, avec de nombreux lots intéressants, parmi lesquels quelques-uns mettent en évidence les productions des Didot.

Voici une sélection de ces lots, tous illustrés avec les photos de la SVV :

Lot 140.

Estimation : 300 € – 500 € – adjugé 350 euros.

COLLECTION DES MORALISTES ANCIENS DEDIEE AU ROI. Paris, de l’Imprimerie de Didot l’Ainé, 1782-94. 17 tomes reliés en 8 volumes in-16, maroquin rouge, dentelle dorée sur les plats, dos orné, tranches dorées (reliure de l’époque). 1. Pensées morales d’Isocrate par Auger – 2. Pensées morales de Cicéron par Levesque – 3. Manuel d’Epictète par M.N. – 4. Pensées morales de divers auteurs chinois par Levesque – 5. Pensées morales de Confucius par Levesque – 6 et 7. Les entretiens mémorables de Socrate par Levesque (2 tomes) – 8. Sentences de Théognis, Phocylide et Pythagore par Levesque – 9. Caractères de Théophraste par Levesque – 10, 11 et 12. Discours pour servir d’introduction à la morale de Sénèque par M.N. Morale de Sénèque par M.N. – 13, 14 et 15. Apophthegmes des lacédémoniens – Pensées morales de Plutarque (2 tomes). 16 et 17. Morale de Jésus Christ et ses apôtres (reliures différentes, 1785). Il manque le volume des philosophes grecs pour former la collection complète. Petit manque à l’angle d’un plat, sinon belle condition d’ensemble. (Brunet III, 1883).

Sur la Collection des Moralistes anciens, on peut lire ces deux articles :

la Collection des Moralistes Anciens.

Collection des Moralistes anciens : quelques particularités.

Lot 141.

Estimation : 600 € – 800 € – adjugé 850 euros.

COLLECTION DES OUVRAGES IMPRIMES PAR ORDRE DU COMTE D’ARTOIS. Paris, de l’Imprimerie de Didot l’Ainé, 1780-81. 22 volumes in-16, tous reliés en maroquin rouge ou vert, dos ornés, tr. dorées (reliure de l’époque). Imprimé par ordre du comte d’Artois, chacun des titres de cette collection fut TIRE A 60 EXEMPLAIRES, sur papier vélin avec les armes du comte d’Artois imprimées. – Les amours de Psyché et Cupidon. 1782. 2 tomes en 1 vol. mar. rouge. – Les jardins ou l’art d’embellir le paysage. 1782. 1 vol., mar. rouge. – Dom Carlos, nouvelle historique. 1780. 1 vol., mar. rouge. – Le Prince Gérard, comte de Nevers. 1780. 1 vol., mar. rouge. – Conjuration des espagnols contre Venise. 1781. 1 vol., mar. rouge. – Histoire d’Aloïse de Livarot. 1780. 1 vol., mar. rouge. – Lettres de Milady Juliette Catesby. 1780. 1 vol., mar. rouge. – Sargines, nouvelle. 1781. 1 vol., mar. rouge. – Le temple de Gnide. 1780. 1 vol., mar. rouge. – Acajou et Zirphile. 1780. 1 vol., mar. vert. – OEuvres choisies de Boileau Despréaux. 1780. 1 vol., mar. vert. – Les aventures de Télémaque. 1781. 4 vol., mar. vert. – Le berceau de la France. 1780. 2 vol., mar. vert. – Lorrenzzo, nouvelle. 1781. 1 vol., mar. vert. – Contes moraux. 1780. 1 vol., mar. vert. – Fables de La Fontaine. 1781. 2 vol., mar. vert. – Les Amours de Daphnis et Chloé. 1780. 1 vol., mar. vert. Réunion de 22 volumes (sur 64 publiés), tous en très bel état.

Sur la Collection d’Artois, on peut lire la collection d’Artois, Didot.

Lot 154.

Estimation : 300 € – 500 € – adjugé 400 euros.

FENELON. Les aventures de Télémaque, fils d’Ulysse. Paris, de l’imprimerie de P. Didot l’Aîné, 1796. 4 volumes in-12 de [8]-240 et [6]-292 et [6]-248 et [6]-260 pages, maroquin groseille, guirlande de feuillage et filets dorés encadrant les plats, dos lisse finement orné de fleurons et feuillages dorés sur un fond de pointillés, roulette intérieure, tr. dorées (P. Bozerian Jeune). Illustrée d’un portrait de Fénelon d’après Vivien, gravé par Gaucher et de 24 ravissantes figures avant la lettre par Queverdo, gravées par Dambrun, Delignon, de Launay, Gaucher et Villerey. Petites taches sans gravité sur 3 plats, rousseurs éparses, 3 pages tachées en marge dont 1 planche. Exemplaire à grandes marges sur grand papier, conservé dans de fines reliures décoratives signées de Bozérian. (Cohen, 206).

Cette édition n’est pas faite dans le cadre d’une collection ; elle témoigne de la grande popularité du texte encore à cette époque.

Lot 155.

Estimation : 300 € – 400 € – adjugé 320 euros.

FENELON. Les aventures de Télémaque, fils d’Ulysse. Paris, imprimerie Didot l’aîné, 1781. 4 tomes reliés en 2 volumes in-16, maroquin framboise, filets dorés encadrant les plats, large dentelle intérieure, dos à nerfs finement orné, tranches dorées sur marbrure (Thibaron). Belle édition imprimée par Francois Ambroise Didot dans la collection d’Artois, collationnée sur trois manuscrits, comparés entre eux, puis avec les éditions anciennes et modernes sous les yeux de l’abbé Gallard dépositaire de tous les manuscrits de l’auteur. Bel exemplaire finement relié Thibaron. Provenance : Bibliothèque Marcel de Merre (ex-libris doré) – Ex-libris gravé à monogramme EDB.

Une autre illustration de la Collection d’Artois, bien reliée.

Lot 157.

Estimation : 400 € – 600 € – adjugé 800 euros.

FONTENELLE. Entretiens sur la pluralité des Mondes. Paris, Vve. Defer de Maisonneuve, 1796. In-4°, maroquin rouge, larges encadrements dorés sur les plats avec armes dorées au centre, dos à nerfs orné, tranches dorées (reliure de l’époque). Très belle impression sur grand papier avec les grands caractères de Didot le jeune. Exemplaire à grandes marges aux armes de Louis-Henri-Joseph de Bourbon, Duc de Bourbon et prince de Condé (1756-1830), père du duc d’Enghien. Dos et charnières restaurés. Provenance : Duc de Bourbon et Prince de Condé.

Defer de Maisonneuve, puis sa veuve, ont publié quelques beaux livres, avec Didot le Jeune (cousin de Pierre et Firmin Didot), dont certains sont illustrés par des gravures en couleurs, notamment d’après Schall ou Monsiau.

Lot 188.

Estimation : 200 € – 400 € – adjugé 300 euros.

MOREL DE VINDÉ (Charles Gilbert). Zélomir. Paris, Didot l’ainé, 1801. In-12, maroquin bleu nuit à long grain, large dentelle dorée sur les plats, doublure de maroquin citron à long grain encadré de guirlandes dorées, garde de papier doré, dos très finement orné, tranches dorées (Simier). Illustrée de 6 figures hors-texte par Lefèvre, gravées par Godefroy. Quelques rousseurs, dos éclairci. Bel exemplaire à grandes marges dans une remarquable reliure doublée de René Simier, dit Simier Père « relieur du roi » (Cohen, 412).

A la même date, ce livre est publié dans la Collection de Bleuet.

Lot 209.

Estimation : 150 € – 250 € – adjugé 250 euros.

ROUSSEAU (Jean-Baptiste). OEuvres choisies. Odes, cantates, épîtres et poésies diverses. Paris, de l’imprimerie P. Didot l’aîné, An VII (1799). 2 volumes in-12, maroquin rouge à long grain, filets et chaînettes dorés encadrant les plats, dos orné aux petits fers, doublure et gardes de moire bleue, tranches dorées (P. Bozérian). Jolie édition stéréotype. L’ouvrage fut imprimé pour la première fois en 1790 par ordre du Roi pour l’éducation du Dauphin. Fines reliures signées Bozérian. Étiquette J.F.B.

Les éditions stéréotypes, ancêtres des éditions courantes de poche, étaient des éditions populaires sur un papier de relativement mauvaise qualité ; mais il existait en fait tout une gamme de qualités, jusqu’au « grand papier-vélin » – ce qui justifie qu’on puisse rencontrer certains exemplaires avec des reliures luxueuses comme ici.

Lot 277.

Estimation : 400 € – 600 €  – adjugé 800 euros.

[NODIER (Charles)]. Collection de petits classiques françois. dédiée à S.A.R la duchesse de Berry. Paris, Delangle, 1825-29. 12 volumes in-8, demi-maroquin bradel acajou à coins, dos lisses ornés en long, couvertures et dos conservés, non rognés (E. Carayon). Collection comprenant strictement 8 volumes puis complétée par 4 autres et imprimée à 500 exemplaires aux frais et par les soins de Charles Nodier et N. Delangle avec les caractères de Jules Didot aîné. Le premier volume renferme le prospectus de l’édition, le second (Voyage de Chapelle) la justification du tirage avec l’avis des éditeurs « nous prenons ici l’engagement de remettre gratis cent exemplaires de la collection complète à toute personne qui nous raporteroit un seul sans numéro… ». L’un des 25 exemplaires numérotés sur Hollande. Le volume des poésies de Ch. Nodier est enrichi d’un bel ENVOI MANUSCRIT de l’auteur à son ami le peintre Alphonse De Cailleux. 1. Conjuration du Comte de Fiesque – 2. Voyage de Chapelle et de Bachaumont – 3. Madrigaux de monsieur de la Sablilere – 4. Fables de Fénélon archevêque de Cambral (Paris, Rapilly) – 5. OEuvres choisies de Sarrazin – 6. La Guirlande de Julie – 7. Relation des campagnes de Rocroi et de Fribourg – 8. OEuvres choisies de Sénecé – 9. Diverses petites poésies du chevalier d’Aceilly -10. Poésies diverses de Ch. Nodier – 11. Poésies de madame Evelines Désormery – 12. Esquisses poétiques, par Edouard Turquety. Très bel ensemble dans de fines reliures décoratives signées d’Emile Carayon. (Vicaire II, 879-881).

Cette collection, imprimée par Jules Didot, marque la transition entre le style Didot de son père Pierre et les publications plus décoratives en vogue au XIXe siècle.

La provenance est intéressante : Charles Nodier et Alphonse de Cailleux vont publier, avec le Baron Taylor, la fameuse série des Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France.

Dans cette vente figurent bien d’autres exemplaires intéressants, évidemment – ce n’est qu’un petit aperçu, centré sur une famille d’éditeur.

Les éditeurs en question (Firmin, Pierre, Didot le Jeune, Jules Didot) sont présentés dans cet article : Publié par Didot… mais quel Didot ??

une supplique de Didot Jeune à Monsieur, en 1790.

Le 24 janvier 2023, la SVV Conan Belleville (Lyon) met en vente, sous le numéro 7697, le lot suivant :

Description :
DIDOT & FIRMIN DIDOT. Pièce manuscrite « Mémoire », 1. in-folio 16 avril 1790. En bas de la supplique, le mot « Bon » de Monsieur.
Estimation : 400 à 500 euros.

Il s’agit d’une supplique, envoyée par Pierre-François Didot (dit Didot Jeune), à Monsieur, frère de Louis XVI, datée du 16 avril 1790.

source : Drouot.com

Voici le texte de la supplique :

Le Sieur Pierre-François Didot, directeur de
l’Imprimerie de Monsieur depuis 1776, a l’honneur
de représenter très humblement qu’il n’a épargné ni
peines, ni soins, ni dépenses, pour concourir à la perfection
de son art ; que flatté du titre d’imprimeur de
Monsieur, qui a toujours encouragé ses efforts, il
désireroit associer à ce titre dont il est honoré, et à ses travaux,
Pierre Nicolas Firmin Didot, l’aîné de 5 fils qu’il a à
établir. Si Monsieur daignoit lui accorder la
survivance de Directeur de l’Imprimerie de
Monseigneur, cette grâce seroit d’autant plus
précieuse au suppliant que son tems et ses occupations
sont partagés à perfectionner à Essonnes une manufacture
de papier qui ne sera connue doresnavant que sous
le nom de Papeterie de Monsieur, et qu’il
espere ne la céder à aucune autre fabrique de
papiers, soit de France, soit des pays de
l’Etranger.

Nous sommes donc en avril 1790, assez longtemps après la prise de la Bastille ; depuis octobre 1789 le comte de Provence est installé au Petit Luxembourg ; il fuira en juin 1791 – on peut penser que cette demande a dû lui paraître assez futile… En tout cas elle indique qu’en avril 1790 il n’est pas évident, pour Didot, que la royauté soit condamnée par la Révolution en cours.

Il faut noter une imprécision assez étonnante de la part de la svv : le fils de Pierre François Didot (le jeune), Pierre Nicolas Firmin, est visiblement confondu avec son cousin, Firmin Didot, second fils de François Ambroise Didot (frère aîné de Pierre François), qui sera le fondateur de la branche pérenne de la famille, laquelle prendra le nom de Firmin-Didot. Pierre-Nicolas-Firmin, lui, sera connu, comme son père, sous le nom de Didot le Jeune.

Marques typographiques des deux Didot Jeune, Pierre-Nicolas-Firmin, et Pierre-François, son père.

Sur les liens de famille des Didot, on peut lire :

Publié par Didot… mais quel Didot ??

Prud’hon : gravures pour les ouvrages de Didot.

Le 25 novembre 2022, la svv Ferri propose la première partie de la Bibliothèque Marcel Lecomte, à Drouot. Voici la description du lot 29, particulièrement intéressant pour les amateurs de gravures néo classiques, et de belles éditions de Didot :

source : Drouot.com

29. PRUD’HON (Pierre-Paul).

Suites complètes des gravures seules illustrant les ouvrages suivants :

– Bernard (P.-J.). Œuvres, 4 figures par Prud’hon, gravées par Prud’hon, Beisson et Copia (Didot, 1797).
– La Fontaine. Les Amours de Psyché et de Cupidon, 5 figures de Gérard, gravées par Blot, Marais, Mathieu, Nicollet et Tardieu (Didot, 1797).
– Longus : Les Amours pastorales de Daphnis et Chloé, 9 figures par Prud’hon et Gérard, gravées par Godefroy, Massard, Marais et Roger (Didot, 1800).

Ensemble 18 pièces en superbes épreuves, à toutes marges, reliées en un album in-4, demi-maroq. rouge à grains longs, dos finement orné, avec pointillé et vase antique, plats papier maroq. de même ton (étiquette de Decle, papetier-relieur à Paris), dans un étui (Rel. de l’époque, étui moderne).
Ces très belles figures, en premier tirage, comptent parmi les chefs-d’œuvre de Prud’hon et sont très recherchées, en particulier pour la charmante pièce : «Amours de Phrosine et Mélidore » (Goncourt, 4), la seule gravure que le maître ait incontestablement faite lui-même. « C’est une véritable curiosité artistique » (Cohen, col. 134). Le présent recueil est enrichi d’une très rare épreuve de cette gravure avant la lettre et avec signature à la pointe, toutes marges, portant le cachet de la collection Beraldi.

On a joint également dans un étui moderne imitant la reliure de l’album, même décor au dos, le précieux cuivre original de Prudhon pour « Phrosine et Mélidore », aciéré et doré.

On peut considérer cette illustration pour le poème de Gentil Bernard comme un modèle précurseur pour la lithographie romantique du début du19e s., particulièrement pour Chassériau et Delacroix.

ENSEMBLE UNIQUE.
Provient de la bibliothèque Henri Beraldi (ne figure pas au cat., mais porte le cachet indiqué et signalé par Cohen (col. 134) qui indique : « Le cuivre original appartient à M. H. Beradi ».

Le lot, estimé 3000 à 4000 euros, est adjugé 7800 euros, soit 9857 euros avec les frais.

Voici la reproduction du cuivre aciéré et doré :

source : Drouot.com

On peut lire les articles suivants, en lien avec ce lot :